. [LE GÉNIE FRANÇAIS] Gernelle et le premier micro-ordinateur de l’Histoire

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#webtube : Une grande idée dans une petite machine, le Micral N. Non, les révolutions technologiques ne viennent pas toutes de Californie. La première machine informatique, appelée « ordinateur personnel », n’a pas vu le jour dans un garage américain mais dans un modeste local de la région parisienne. Et son inventeur, François Gernelle, n’avait sous les yeux que des circuits imprimés et un budget qui tenait dans une poche de chemise.

Les ordinateurs étaient encore de grandes armoires

Nous sommes en 1973 et l’INRA (Institut de recherche agronomique) cherche un moyen d’automatiser des mesures sur des cultures de blé. Les grands ordinateurs de l’époque – ces monstres qui remplissent des pièces entières – coûtent une fortune. On fait donc appel à la petite société R2E, spécialisée dans les systèmes électroniques, et à son ingénieur vedette : François Gernelle.

Une idée révolutionnaire

Gernelle n’a rien du savant fou. C’est un homme réservé, calme et méthodique. Il a une idée simple et lumineuse : utiliser un microprocesseur pour créer une machine compacte, programmable et surtout abordable. Cette minuscule puce apparue récemment est une invention américaine – à tout seigneur tout honneur. Aujourd’hui, cela semblerait évident, mais en 1973, alors qu’on parle encore d’ordinateurs avec distance et un peu de crainte, l’idée est déjà reconnue comme révolutionnaire, de l’autre côté de l’Atlantique.

Pas plus grand qu’un attaché-case

C’est ainsi qu’est né le Micral N. Une petite boîte beige, pas plus grosse qu’un attaché-case, mais débordant d’intelligence, ou plutôt de connaissances. Pour la première fois, un ordinateur n’est plus une forteresse technologique, c’est un appareil qu’on peut installer « bêtement » sur une table et utiliser en le branchant sur une prise.

Lorsque le prototype est présenté à l’INRA, certains ingénieurs – habitués aux énormes calculateurs IBM – ont d’abord cru qu’il s’agissait d’un boîtier vide, d’une maquette de démonstration. Un chercheur l’aurait soulevé, étonné de son poids plume, avant de demander : « Mais… où est l’ordinateur ? » Gernelle aurait simplement répondu, en souriant : « Vous l’avez entre les mains. »

À ce sujet — [LE GÉNIE FRANÇAIS] La machine à calculer

Pas de clavier, pas d’écran

Les grands esprits se rencontrent : le Micral fonctionne donc grâce à un microprocesseur. Pas de clavier, pas d’écran, on utilise des cartes perforées, des téléscripteurs, tout ce que les ingénieurs peuvent récupérer ou adapter. Et le résultat était là : un ordinateur personnel vendu quelques milliers de francs, quand les machines concurrentes coûtent dix à trente fois plus !

Le Micral N, tout premier micro ordinateur de l’Histoire

L’Amérique prépare le grand assaut

Pendant que le Micral se vend modestement dans l’Hexagone et qu’il grandit tranquillement, l’Amérique prépare le grand assaut : l’Altaïr 8800, de Mits, puis Apple, puis IBM PC. Une vague gigantesque qui va tout emporter sur son passage.

Le Micral, lui, n’a pas bénéficié d’une communication tonitruante : pas de budget, pas de Jacques Séguéla ni de Philippe Michel, le génie parisien connu de tous les professionnels de la publicité de l’époque. C’est à ce dernier (et à son équipe dont votre auteur faisait partie) que Steve Jobs confiera sa marque Apple pour l’Europe : plus gros budget publicitaire français avec Renault. Par l’humour et la simplicité des slogans, des films et affiches devenus célèbres, la peur de l’ordinateur s’est envolée. Et dans les années 1980, le « computer » américain (nommé Macintosh, puis Apple II C) est entré chez M. Tout-le-Monde au nez et à la barbe de François Gernelle. Pendant que Steve Jobs et Bill Gates devenaient milliardaires.

Pas de garage, pas de légende

Pas de mythe fondateur hollywoodien, pas de garage, pas de légende, juste un ingénieur brillant, des collègues talentueux et un sens du pragmatisme admiré mais rarement célébré. Les historiens de l’informatique sont aujourd’hui formels : le Micral N est le premier micro-ordinateur commercial au monde. Pas un bricolage artisanal, pas un prototype de laboratoire, mais une machine construite en série et vendue à des clients tous satisfaits. Une première mondiale… bien de chez nous.

Le génie d’un Blaise Pascal en héritage

Cette petite victoire technologique est typiquement française et digne de la machine à calculer de Pascal, la Pascaline. Modeste, discrète, presque invisible, elle est pourtant fondée sur un savoir-faire incontestable. On ne l’a pas crié sur tous les toits ; on l’a fabriquée, tout simplement. Avec la conviction tranquille que l’ingéniosité ne dépend pas d’un drapeau mais d’un cerveau bien fait.

Nostalgie

11 juin 2017. Quarante-cinq ans plus tard, l’un des cinq derniers exemplaires connus du Micral N sera vendu aux enchères 50.000 euros. Son acheteur n’est autre que Paul Allen, l’un des fondateurs de Microsoft, qui en a fait l’acquisition pour le Living Computer Museum de Seattle. Comme souvent dans notre Histoire, nous avons inventé quelque chose avant les autres, puis laissé les autres en faire une saga mondiale. Mais qu’importe : la vérité historique est têtue. Et elle a un nom : Micral N. Une petite machine pour une grande idée.

Antoine de Quelen, dans BV

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